La confusion des extrêmes

Depuis quelques mois, dans beaucoup de médias généralistes, Mélenchon et Le Pen sont mis dans le même sac. Par exemple, les sympathisants du premier et de la seconde sont regroupés dans la même colonne quand on présente les résultats d’un sondage. Ou alors, ils sont cités ensemble dès qu’il est question des bords extrêmes de l’échiquier politique. On trouve aussi des articles expliquant doctement que l’un et l’autre se rejoignent au prétexte qu’ils chassent sur les mêmes terres électorales.

Ce genre de confusion me gêne. Non, Mélenchon et Le Pen, ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas la même vision des individus, ce n’est pas le même modèle de société, ce ne sont pas les mêmes diagnostics aux problèmes des citoyens et le plus souvent, ce ne sont pas non plus les mêmes solutions. Laisser croire le contraire, c’est le niveau zéro de l’analyse politique, c’est entretenir sciemment l’idée un peu facile, un peu molle, mais politiquement mortifère, que la gauche et la droite, c’est la même chose.

Examinons leurs idées. L’un est contre la peine de mort, l’autre est pour. L’un fait plutôt pencher le curseur vers l’éducation, l’autre vers la répression. L’un souhaite intégrer les étrangers, par exemple en leur donnant le droit de vote aux élections locales, l’autre souhaite réduire leurs droits, voire les expulser du territoire. L’un est favorable à l’IVG, au mariage gay et à quelques autres idées progressistes, l’autre est résolument opposée à toute idée pro-choix. L’un est laïc, voire anti-clérical, l’autre chouchoute les cathos et ne s’affirme laïque que quand ça l’arrange, c’est-à-dire pour pouvoir taper sur les musulmans. L’un veut rester dans l’euro, l’autre veut en sortir. L’un est résolument anti-capitaliste, l’autre est de tendance plutôt libérale. En fait, leur seul point commun, c’est leur radicalité, qui fait que s’ils accédaient un jour au pouvoir, ce serait une catastrophe…

Bien sûr, les deux cherchent à draguer les mêmes électeurs. Mais s’ils y parviennent, ça ne veut pas dire qu’ils ont les mêmes idées, ça veut juste dire que leurs électeurs le pensent. Et comment pourrait-il en être autrement, puisque les médias, en regroupant souvent l’extrême-gauche et l’extrême-droite, encouragent cette confusion des extrêmes dans la tête des électeurs ?